New York, le 11 novembre 2022 - Moody’s Investors Service ("Moody’s") a relevé aujourd’hui les notations à long terme des émetteurs en devises locales et étrangères du gouvernement de la République Démocratique du Congo (RDC) de Caa1 à B3 et a changé la perspective de positive à stable.

La décision de relever les notes des émetteurs à B3 reconnaît le renforcement des perspectives économiques et budgétaires du pays favorisé par les améliorations institutionnelles soutenues par le programme du FMI qui a débuté en juillet 2021. La position extérieure du pays continue également de se renforcer, comme en témoigne l’accumulation de réserves de change officielles. Malgré les améliorations récentes, la solvabilité de la RDC reste limitée par son très faible PIB par habitant, sa faible compétitivité, ses institutions encore faibles et la détérioration du risque politique, ainsi que sa capacité de financement intérieure très limitée et sa dépendance à l’égard des financements concessionnels extérieurs.

La perspective stable reflète le point de vue de Moody’s selon lequel les risques de crédit sont équilibrés à B3 entre le potentiel d’évolutions plus positives des fondamentaux du crédit de la RDC, si les réformes structurelles se poursuivent et que les prix élevés des matières premières soutiennent de nouvelles améliorations de la solidité économique et budgétaire ainsi qu’une nouvelle réduction des vulnérabilités face à des risques intérieurs et géopolitiques élevés, des institutions très faibles mais en amélioration, et la vulnérabilité toujours élevée aux chocs des prix des matières premières qui peuvent se traduire par de graves épisodes de volatilité macroéconomique.

Parallèlement, les plafonds nationaux en monnaie locale (LC) et en monnaie étrangère (FC) de la RDC ont été relevés à B2 et B3, respectivement, contre B3 et Caa1 auparavant. L’écart d’un cran entre le plafond LC et la notation souveraine reflète un degré élevé d’imprévisibilité des actions gouvernementales, le risque politique intérieur, ainsi que l’exposition importante de l’économie au secteur minier. L’écart d’un cran entre le plafond FC et le plafond LC reflète l’efficacité limitée des politiques et l’ouverture relativement faible du compte de capital et les risques de convertibilité compte tenu des antécédents de volatilité des taux de change lors des épisodes de chocs sur les prix des produits de base.

Les améliorations institutionnelles, en particulier dans la gestion des finances publiques, y compris l’administration fiscale et le renforcement du cadre de la politique monétaire, représentent un moteur clé du passage à B3. Moody’s s’attend à ce que les recettes publiques atteignent 15,4% du PIB en 2022, trois ans en avance sur l’objectif fixé au début du programme du FMI. L’objectif était d’augmenter les recettes publiques de quatre points de pourcentage pour atteindre 14 % du PIB d’ici 2025. Les recettes publiques ont atteint un point bas en 2020 à 9 % du PIB. Alors qu’une partie importante de la hausse des revenus peut s’expliquer par l’augmentation de la production intérieure de produits de base et la hausse des prix internationaux, une part tout aussi importante peut également s’expliquer par les réformes menées au cours de la période. Il s’agit notamment d’améliorer l’efficacité de l’administration fiscale par la simplification, la rationalisation des dépenses fiscales et de certaines charges non fiscales, l’amélioration de l’efficacité de la TVA et la promotion de la numérisation. Dans l’ensemble, la crédibilité du budget a été renforcée ainsi que la gestion de la trésorerie avec des ressources affectées aux dépenses d’investissement et exécutées comme telles. Entre-temps, l’indépendance de la Banque Centrale du Congo a été réaffirmée et le gouvernement a signé un accord de reconnaissance de la dette due à la banque centrale, ce qui constitue une première étape vers sa recapitalisation.

Moody’s s’attend à ce que les autorités continuent à renforcer le cadre de la politique budgétaire du pays ainsi qu’à améliorer la transparence, en particulier dans le secteur minier. La Banque Centrale est également impliquée dans les réformes visant à améliorer la supervision du système bancaire ainsi que la stabilité financière et des prix et la stabilité extérieure.

Des perspectives économiques solides soutenues par le secteur minier ; une position extérieure renforcée réduit la gravité des épisodes potentiels de volatilité macroéconomique

Les solides perspectives de croissance économique de la RDC soutiennent également la décision de Moody’s d’élever les notations à B3. Moody’s s’attend à une croissance moyenne du PIB de 7 % en termes réels sur la période 2022-2025. Le principal contributeur à la croissance a été le secteur extractif qui devrait continuer à jouer un rôle majeur dans l’économie et devrait continuer à croître d’environ 10 % chaque année. La demande mondiale de cuivre et de cobalt (les principales exportations minières de la RDC) devrait rester forte avec une croissance continue de la demande de composants pour véhicules électriques dans le monde. La production de cuivre continue de s’accélérer, et les autorités prévoient que celle-ci dépassera 2,3 millions de tonnes en 2022 (contre 1,7 million de tonnes en 2020) et révisent à la hausse les projections à près de 3 millions de tonnes d’ici 2026. Au-delà du secteur minier, l’économie devrait bénéficier de l’augmentation des dépenses en capital du gouvernement et du niveau croissant d’investissement dans l’économie pour remédier aux principaux goulots d’étranglement des infrastructures, le secteur des services restant le deuxième contributeur à la croissance au cours des prochaines années.

Parallèlement, la position extérieure de la RDC s’est améliorée, comme en témoignent l’accroissement des réserves officielles de change à la banque centrale et la stabilisation durable du taux de change du franc congolais par rapport au dollar américain. Ce dernier est stable depuis 2020 à environ 2000 CDF par dollar. Les réserves de change se sont accumulées à un rythme rapide pour atteindre un niveau record de 4,4 milliards de dollars fin août 2022 (ce qui équivaut à 2,4 mois de couverture des importations de biens et services) contre 710 millions de dollars fin 2020 (équivalent à 0,6 mois ). Moody’s prévoit que les réserves officielles brutes de change continueront d’augmenter et dépasseront 6 milliards de dollars d’ici 2025, soutenues par le compte courant du pays qui devrait rester légèrement excédentaire sur la période 2022-2025. Des décaissements supplémentaires des institutions financières internationales soutiendront également les réserves, en particulier pendant la mise en œuvre du programme. Cette amélioration structurelle réduit l’exposition du pays aux baisses des prix des matières premières et la sévérité des épisodes de volatilité macroéconomique qui y sont associés.

La solvabilité reste limitée par des défis de crédit chroniques

En dépit des récentes améliorations institutionnelles et de l’amélioration des perspectives économiques, la solvabilité de la RDC reste limitée par une série de problèmes de crédit chroniques : un PIB par habitant très faible, qui est l’un des plus bas de l’univers de notation de Moody’s ; une faible compétitivité et d’importantes lacunes en matière d’infrastructures qui limitent le potentiel de croissance ; une force institutionnelle encore faible, bien qu’en voie d’amélioration, la RDC se situant dans le bas des classements internationaux mesurant la gouvernance et l’efficacité des institutions ; et une capacité de financement interne très limitée et une dépendance à l’égard des financements concessionnels externes, malgré le faible endettement de la RDC.

L’exposition aux risques sociaux est très fortement négative (comme le montre la note S-5 du profil d’émetteur de Moody’s), principalement liée à la pauvreté, aux faibles résultats en matière d’éducation et au faible accès aux services de base. Par ailleurs, la RDC reste vulnérable au risque politique à l’approche de l’élection présidentielle de l’année prochaine et à l’instabilité accrue dans l’est du pays avec la récente résurgence du groupe rebelle M-23.

Justification des perspectives stables

Les perspectives stables reflètent l’opinion de Moody’s selon laquelle les risques de crédit sont équilibrés à B3 entre le potentiel d’évolutions plus positives des fondamentaux du crédit de la RDC, si les réformes structurelles se poursuivent et les prix des matières premières restent favorables, contre des risques intérieurs et géopolitiques élevés, des institutions très faibles, bien qu’en amélioration, et la vulnérabilité encore élevée aux chocs prolongés sur les prix des produits de base qui peuvent se traduire par de graves épisodes de volatilité macroéconomique. Moody’s s’attend à ce que l’économie continue de croître rapidement, malgré d’importantes lacunes en matière d’infrastructures, un très faible revenu par habitant, une faible compétitivité et une très faible capacité institutionnelle qui sont des contraintes à long terme pour les notations. Les autorités devraient continuer à mettre en œuvre des réformes structurelles dans le cadre du programme du FMI avec un contrôle budgétaire relativement strict pour éviter un dérapage budgétaire important. En conséquence, la dette publique restera très faible et abordable.

Source : Moody’s. Lire l’article original ici !